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Chirac : paroles, paroles...

Source :RFI / 24/04/2005

« Chirac, un bon gars sans bilan » titre Courrier International, reprenant un commentaire du Guardian de Londres. « Elu pour la première fois il y a quarante ans, président depuis bientôt dix ans, il a toujours su jouer de sa proximité avec les Français. » Illustration, je cite toujours, « au début de sa carrière, il veillait à toujours avoir une réserve de glaçons à l’arrière de sa voiture, afin de pouvoir y plonger ses doigts endoloris par les poignées de mains distribuées à chacune de ses étapes de campagne ! » « Comme les Français -poursuit le confrère britannique- Jacques Chirac n’est pas toujours d’une honnêteté irréprochable : si ses électeurs trichent dans leur déclaration fiscale et font tout pour ne pas régler leurs contraventions, l’homme qui les dirige est accusé d’avoir procuré des emplois à ses copains. Trafiqué des listes électorales, organisé le financement illégal de son parti et de s’être offert en liquide de luxueuses vacances à l’étranger.


Les Français sont friands du "pas vu pas pris" ; les nombreuses affaires de corruption dans lesquelles Chirac a été impliqué ne l’ont même pas égratigné. » Un expert confirme ici : « Chirac nous ressemble... De Gaulle fut notre père, Mitterrand nous a fait rêver, Giscard a été notre professeur d’économie.

Chirac, lui, c’est le cousin qui a réussi. » L’Express évoque également ce « cap redoutable, celui des dix ans de présence à l’Elysée. » Au moment où « une victoire du non (au prochain référendum sur l’Europe) sonnerait comme un préavis de licenciement. » Quant à la « perspective d’une nouvelle candidature à l’Elysée en 2007, elle divise la chiraquie historique. »

Proposant un florilège rétrospectif des propos chiraquiens au cours de la décennie qui s’achève, Courrier International cite encore le madrilène El Pais, dépeignant un « homme à la culture rentrée, à la tendresse blindée et à la maladresse directe et agressive » mais qui « sait agir avec la détermination implacable d’un chef. » L’Hebdo de Lausanne présente « un comédien au pouvoir.

Une sorte d’ancêtre décoratif. Un guerrier usagé, asthmatique, avec des mots brefs, des idées courtes et des jambes interminables. Mais au moins, avec Jacques Chirac on peut continuer à rigoler. Peut-être qu’il pique de l’argent dans la caisse, mais il ne fera jamais le malheur de personne. » Selon l’International Herald Tribune « Chirac prospère sur les ambiguïtés. » Il est en fait « ambigu comme la France. »

Le Nouvel Observateur se souvient aussi, avec ce surtitre « paroles, paroles... », de celui qui « avait promis de soigner la France du cancer du chômage et de la pauvreté. Dix ans plus tard, les inégalités se sont encore creusées. » L’hebdomadaire a « retrouvé les Français que le candidat Chirac avait rencontrés en 1995. Leurs récits dressent un tableau bien sombre. » Exemple, ce médecin de Lyon pour qui « la fracture sociale est devenue un gouffre.

Les pauvres sont de plus en plus en désarroi, les riches s’enrichissent et la classe moyenne disparaît. » Cet homme dit encore : « Quand Juppé a créé le forfait hospitalier à 7 euros et demi par jour, il ne devait pas bouger. Aujourd’hui, il est passé à 14 euros. On voit bien comment les plus pauvres sont progressivement en train d’être exclus du système de soins. » Deux autres chiffres éloquents fournis par le Nouvel Observateur : croissance de 25 % en dix ans des bénéficiaires du revenu minimum (plus d’un million deux cent mille personnes).

Et doublement du nombre de ménages surendettés (presque deux cent mille) ! Décrivant de son côté « une monarchie inavouée », le Point montre « l’épouse (Bernadette) et la fille (Claude) de Jacques Chirac (qui) sont à la fois ses conseillères et ses gardes du corps. Un triumvirat qui ne redoute qu’une chose : la retraite. » Tandis que « toute la chiraquie s’interroge. Et de plus en plus ouvertement, de plus en plus sévèrement.

La solitude, l’âge, le bilan, l’usure, tout y passe, y compris la nature du président qu’après tant d’années ses intimes déchiffrent mal. » Une publication hors série de Libération consacrée aux « dix Chirac » peut aider à ce décryptage.

L’éditorial se demande « comment un type aussi anodin, souvent décevant, parfois médiocre, a-t-il pu non seulement atteindre les cimes du pouvoir mais s’y maintenir aussi longtemps ? » Ce confrère ajoute : « En trois candidatures présidentielles, le "papy flingueur" de la droite a dispersé Valéry, ventilé Edouard et renvoyé Lionel au terminus des prétentieux. Reste à éparpiller Nicolas façon puzzle en 2007. » Question posée au « caméléon » en 1995 : « Etes-vous de gauche ? » « Bien sûr -répond Chirac- je suis de gauche ! Je mange de la choucroute et je bois de la bière ! »

Alain Masson

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