Articles les plus visités

Bienvenue au Village Fédéral, agrégateur de consciences, dédié aux hautes aspirations de l'humanité, le savoir, la liberté et la solidarité... Les citations du moment... L'utopie n'est pas l'irréalisable, mais l'irréalisé. Theodore Monod... L'opprimé d'aujourd'hui sera l'oppresseur de demain. Victor Hugo... Il n'est pas besoin d'esperer pour résister. Auteur inconnu... "La lutte des classes existe, et c'est la mienne qui est en train de la remporter." Warren Buffet (milliardaire)... LE POUVOIR NE SOUHAITE PAS QUE LES GENS COMPRENNENT QU’ILS PEUVENT PROVOQUER DES CHANGEMENTS. Noam Chomsky... Le courage, c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel . Jean Jaures... Si tu veux faire de ce monde un endroit meilleur, jette un œil sur toi-même et fait un changement... If You Wanna Make The World A Better Place, Take A Look At Yourself And Then A Make A Change. Michael Jackson (Man In The Mirror)...
RÉSEAU SOCIAL SOLIDAIRE

Développement humain dans le monde Arabe

Voyage dans une économie au bord du chaos

Source : L’Expansion / 28/09/2004

Pourquoi le grand Moyen-Orient s’est-il exilé du monde de la prospérité ? Du Maghreb au Pakistan, entre pétrole et sous-développement, « L’Expansion » a enquêté sur cette énigme.

Imaginez une petite annonce pour investisseurs qui commencerait ainsi : « Des milliers de kilomètres de plages, du soleil à en revendre, des déserts immaculés, des ruines inscrites au Patrimoine mondial, du gaz et du pétrole à gogo, une main-d’oeuvre abondante et pas chère, un marché de 560 millions d’habitants grand comme deux fois les Etats-Unis, une langue écrite partagée par la moitié de ses habitants et un consensus social irrésistible autour d’une même et (presque) unique religion, qui porta l’une des plus riches civilisations de l’histoire... »

Aucune région du monde ne pourrait dresser un inventaire aussi mirobolant. Et pourtant cette longue bande de terre qui ceinture à demi la planète - le grand Moyen-Orient - a comme disparu des écrans de la mondialisation. Ces 22 pays pèsent à peine 4 % des exportations mondiales - aussi peu qu’en 1973 ! -, n’attirent qu’un flux dérisoire des investissements directs internationaux (0,6 % du PIB global, près de dix fois moins que l’Asie en 2003), et affichent un niveau de vie par habitant qui stagne depuis trente ans !


En l’espace de trois décennies, des dizaines de pays sont sortis du sous-développement et de la dictature, en Asie, en Amérique latine, en Europe... mais pas en Orient. La Grèce, la Pologne, la Corée du Sud, Taïwan ou le Chili ont décollé, portés par une classe moyenne avide de réussir. Pas l’Egypte, ni l’Iran, ni l’Algérie. Bien au contraire, 51 % des jeunes adultes de la région - âgés de 15 à 25 ans - expriment leur désir de tourner le dos à leur pays d’origine en émigrant dans une autre région du monde. Sur cet échec prospèrent le découragement, l’extrémisme, le terrorisme. Le « clash des civilisations. »

Pourquoi le grand Moyen-Orient (GMO) s’est-il exilé du monde de la prospérité et de la démocratie ? Faut-il incriminer l’islam et son conservatisme, le colonialisme, l’absence de démocratie ou bien le socialisme dont plusieurs pays gardent encore des séquelles ? Existe-t-il une malédiction du pétrole, qui favorise la rente plus que le développement ? Quels sont les facteurs les plus aggravants ? La pression démographique, le poids de l’armée, ou encore la timidité des réformes libérales ? Dans ce dossier spécial, L’Expansion a enquêté sur l’énigme du grand Moyen-Orient et éclaire les mystères de ces économies semblables à des « boîtes noires ». Au moment même où Américains, Européens et, c’est nouveau, plusieurs gouvernements et ONG du Moyen-Orient multiplient idées et projets.

Le 11 septembre 2001, la terre n’a pas tremblé qu’à Manhattan. L’onde de choc a traversé tous les pays musulmans. Plusieurs tabous sont tombés avec les deux tours du World Trade Center. Quelque temps avant l’attentat terroriste, une équipe de chercheurs arabes indépendants travaillait déjà sur le « développement humain » des pays du Maghreb et du Machrek. Avec une idée en tête, simple, provocante et partagée par tous les économistes : c’est d’abord la qualité du capital humain qui fait la croissance et le développement. Jamais leur rapport, commandé par le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), n’aurait eu un tel écho dans la région sans la secousse du 11 septembre.

Dans une première étude publiée au printemps 2002, les auteurs identifient et passent au scanner les trois « plaies » de leur région d’origine : « le manque de liberté, l’aliénation des femmes et la faiblesse du processus d’acquisition et d’usage du savoir ». Ce ne sont plus des experts occidentaux, suspects d’arrière-pensées mercantiles, qui le disent, mais des voix arabes respectées. De Rabat à Riyad, le retentissement est considérable. Un an plus tard, les mêmes auteurs récidivent avec une batterie de chiffres inattaquables. Le désert culturel de cette région du monde et l’indigence du système éducatif, des vérités que tant de gouvernements tentaient de masquer, sautent aux yeux de tous. « Le monde arabe traduit environ 330 livres par an, soit cinq fois moins qu’un petit pays de 11 millions d’habitants comme la Grèce. »

Sans précautions oratoires, les auteurs soulignent que le mal est ancien : « Le nombre d’ouvrages traduits depuis le règne du calife Maamoun [IXe siècle] est d’environ 10 000, soit presque le nombre moyen de livres traduits en espagnol chaque année. » Ils ajoutent que 65 millions d’adultes arabes, soit près d’un quart de la population, ne savent ni lire ni écrire et que les budgets consacrés à l’éducation ont diminué depuis une décennie dans la plupart des pays de la région.

Sur le coup, les gouvernements ont très mal réagi à nos rapports, raconte l’un des auteurs, le Syrien Burhan Ghalioun, mais ils n’ont pas pu empêcher leur diffusion. Nos travaux nourrissent le débat dans la presse du Proche- et du Moyen-Orient, ils sont sur Internet en langue arabe, ils circulent, passent de main en main, les opinions s’en sont emparé. » L’islamologue américain Bernard Lewis abonde : « Autrefois, une écrasante majorité des musulmans ne se seraient pas aperçus de l’écart gigantesque avec l’Occident. Aujourd’hui, avec les moyens de communication modernes, même les plus pauvres savent quel fossé les sépare des autres sur le plan personnel, familial, régional et social. »

Des intellectuels donnent l’alarme et réclament une refonte générale des systèmes d’éducation. De tribune en colloque, l’intellectuel algérien Mohamed Arkoun dénonce ainsi ce qu’il appelle l’« ignorance institutionnalisée ». Au Caire, l’économiste égyptien Mohamed el-Sayed ajoute : « Dans l’échelle des valeurs, la culture occupe ici le dernier rang. Même un roman de Naguib Mahfouz, notre Prix Nobel de littérature, ne se vend qu’à quelques milliers d’exemplaires. Seuls les livres sur la religion font un tabac. »

Ala suite des rapports du Pnud, d’autres chiffres tabous sortent de l’ombre. L’OCDE, une organisation qui regroupe les pays les plus riches, va révéler prochainement l’ampleur de la fuite des diplômés de la région : 214 000 Algériens, 202 000 Marocains, 141 000 Egyptiens, 110 000 Libanais ou encore 83 000 Irakiens ayant un niveau éducation supérieur travaillent et vivent aujourd’hui dans l’un des pays de l’OCDE. Une hémorragie qui prive les sociétés de leurs forces vives.

Développement humain dans le monde arabe, suite...



Archives Place Mac Goohan


Accueil (Place du village)

Haut de page