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Prisons françaises : extraits du rapport du Conseil de l’Europe

Source : Temps réel

Le 20.11.2008

Voici les principaux extraits du rapport de Thomas Hammarberg, commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, rendu public jeudi 20 novembre :

Surpopulation carcérale

Au 1er mai 2008 la suroccupation des maisons d’arrêt était de plus de 140 % soit près de 14.000 personnes en surnombre alors qu’il n’y avait que 313 cellules non occupées.

En raison de la surpopulation quasi-généralisée des maisons d’arrêts, le prévenu demandant à bénéficier d’un encellulement individuel risque de se voir proposer une place dans un établissement fort éloigné de son lieu de résidence habituelle. Il sera contraint de choisir entre bénéficier de conditions d’incarcération dignes d’une part et maintenir des liens familiaux ou des contacts directs avec son avocat d’autre part."


Les causes de ce surpeuplement sont multiples (…) Les raisons de cet accroissement résident principalement dans le durcissement des peines prononcées par les juridictions pénales et par un recours accru à la mise en détention. En effet, depuis 2002, une série de lois a modifié la politique pénale en accentuant sa dimension répressive.

Cette tendance risque de s’accentuer avec la mise en place de la nouvelle loi du 10 août 2007 qui institue des peines minimales dites « planchers » pour les délinquants récidivistes. Les juges peuvent écarter ces peines minimales, mais sont contraints de motiver spécialement leur décision. De plus, cette loi consacre l’impossibilité de prononcer une peine autre que l’emprisonnement à la deuxième récidive pour un grand nombre de délits.

L’inflation carcérale constatée depuis 2000 s’est poursuivie. Ainsi, au 1er juin 2008, 63.838 personnes étaient incarcérées soit environ 3.000 personnes de plus que l’année précédente à la même date.

En conséquent, plus de 13.000 détenus étaient en surnombre par rapport aux places disponibles soit un taux d’occupation moyen de près de 125 %. La plupart des établissements pour peines – réservés aux condamnés à de longues peines – dépassent rarement leur taux d’occupation maximal. Il en est tout autre pour les maisons d’arrêts qui ont un taux d’occupation moyen de 140%.

Dans 13 maisons d’arrêts, ce taux dépasse les 200% et certaines dépassent même le seuil des 220% comme à Béthune, Chambéry ou la Roche-sur-Yon. On estime que sept détenus sur dix sont écroués dans des établissements surpeuplés.

Manque de personnel

Le personnel pénitentiaire étant déterminé pour chaque établissement en fonction de sa capacité maximale théorique, toute surpopulation engendre automatiquement une carence en terme de surveillants, de travailleurs sociaux ou de personnel administratif. Ceci a pour conséquence une promiscuité subie accrue, une détérioration des conditions d’hygiène en raison d’un accès réduit aux douches, des délais rallongés pour l’obtention d’une consultation médicale ou des difficultés dans la gestion des parloirs.

Les tensions et des violences entre surveillants et détenus mais aussi entre détenus sont également plus fréquentes. De telles conditions sont intolérables pour les détenus mais aussi pour le personnel de l’administration pénitentiaire qui subissent tous les dysfonctionnements de la gestion pénitentiaire française."

Les cellules individuelles

Le Commissaire invite les autorités françaises à reconnaître de nouveau l’encellulement individuel comme un droit pour tous les prévenus, à garantir sa mise en oeuvre et à assurer la séparation entre prévenus et condamnés.

Prise en charge psychiatrique

Concernant la prise en charge psychiatrique des délinquants sexuels, la législation semble s’orienter vers les impératifs de sécurité pour prévenir les récidives, plus que sur les soins à apporter à ces personnes durant leur détention. Quelques établissements, comme la prison de Melun, se distinguent par la création de parcours de soins thérapeutiques pour les délinquants sexuels, mais ils constituent des exceptions non encore accessibles à l’ensemble des détenus qui devraient en bénéficier. Le Commissaire invite les autorités françaises à développer de telles pratiques et à permettre aux détenus nécessitant une prise en charge particulière d’en bénéficier.

Rétention de sureté

Le Commissaire est préoccupé par le fait que la loi ne distingue pas parmi les criminels concernés par la rétention de sûreté qui s’applique aussi aux mineurs ayant commis des crimes graves. Cette disposition va à l’encontre de la prise en compte de la responsabilité spécifique des mineurs.

A la lumière de ces observations, le Commissaire invite à une extrême précaution dans l’application de la rétention de sûreté qui devrait constituer une mesure de dernier ressort.

Justice des mineurs et réforme de l’ordonnance de 1945

Le Commissaire estime que le problème des jeunes délinquants ne sera pas résolu par des peines plus dures. Une politique réussie sur la délinquance juvénile devrait impliquer au contraire des mesures facilitant la prévention, la réadaptation et l’intégration sociale des jeunes en difficulté. Comme l’indique le Comité des droits de l’enfant, « les États parties devraient intégrer dans leur système de justice pour mineurs des mesures pour traiter les enfants en conflit avec la loi sans recourir à la procédure judiciaire ». L’incarcération des mineurs doit rester le dernier recours." Au contraire de certains arguments entendus, il considère aussi que l’âge auquel des sanctions pénales peuvent être prises devrait être augmenté pour se rapprocher de l’âge de la majorité.

Rétention administrative des étrangers

Les conditions de vie dans certains centres de rétention demeurent difficiles. Le centre de Vincennes semblait cristalliser un grand nombre de récriminations. Il apparaît en effet que des pétitions, tentatives de suicide, automutilations et grèves de la faim étaient malheureusement fréquentes dans ce centre. Elles pouvaient s’expliquer pour partie comme une protestation contre leur arrestation. Toutefois, il apparaît également que les étrangers contestaient les conditions d’hébergement et l’aspect déshumanisé du centre qui avait une capacité d’accueil totale de 280 personnes.

Enfin, il avait été fait état au Commissaire de tensions entre les étrangers retenus et les forces de police en charge de la gestion du centre et du dépôt d’au moins 13 plaintes pénales par les étrangers concernant l’usage des méthodes inappropriées voire violentes. L’incendie volontaire qui a ravagé les locaux du centre de rétention en juin 2008 a été le point culminant de ces tensions. Le Commissaire ne peut que souhaiter que ces incidents inciteront les autorités françaises à revoir de façon critique l’ensemble des conditions prévalant dans les centres de rétention et à les humaniser en concertation avec le nouveau Contrôleur Général des lieux de privation de liberté.

"Le Commissaire appelle les autorités françaises à ce que les droits de l’homme et la dignité humaine soient respectés dans l’ensemble des centres de rétention administratifs et que les conditions de vie offertes aux étrangers retenus à Mayotte soient immédiatement améliorées.

Interpellations près des écoles

Plusieurs cas récents, dont un vérifié par la Défenseure des enfants, où des policiers ont réalisé des arrestations d’enfants dans l’enceinte même d’écoles primaires ont été rapportés. Une telle pratique est intolérable tant elle est traumatisante pour les enfants. Les écoles doivent rester des lieux d’enseignement et d’éducation et non des zones d’interpellations. Le Commissaire appelle les autorités françaises à garantir qu’aucune arrestation d’enfants ou de parents ne soit faite dans ou autour des écoles.

Interpellations à la préfecture

Des interpellations ont également eu lieu dans l’enceinte même des préfectures. Il semble que certains services administratifs avaient mis en place des stratagèmes pour inciter les étrangers irréguliers à venir se présenter à la préfecture et les interpeller sur place. Si les convocations trompeuses à venir se présenter à la préfecture ont depuis été interdites par les juridictions françaises, les préfectures continuent de refuser de communiquer des informations par téléphone et requièrent la présentation des étrangers en préfecture.

Dès lors, des étrangers continuent de se présenter au guichet en toute bonne foi pour déposer des demandes de régularisation ou s’enquérir de l’avancement de leur demande d’asile. En 2007, près de 600 étrangers ont ainsi été arrêtés et placés en rétention58. La préfecture devient le lieu de tous les espoirs mais aussi de toutes les peurs entre possibilité de régularisation et risque d’arrestation. Comme les écoles, le Commissaire considère que les préfectures devraient être des lieux protégés où aucun étranger ne devrait pouvoir être interpellé.

Incidents lors d’expulsions sur des vols commerciaux

Lors de retours forcés d’étrangers irréguliers sur des vols commerciaux, il arrive que les passagers s’insurgent contre cette expulsion auprès du personnel navigant. (…) Il arrive que la police interpelle, en représailles, un petit nombre de passagers ayant protesté pacifiquement ou filmé la scène. Ils sont ensuite poursuivis pour « entrave à la circulation d’un aéronef », « outrage à agent » ou « incitation à la rébellion », placés en garde à vue pendant plusieurs heures et poursuivis pénalement pour les faits incriminés. Certains passagers ont même subi l’humiliation de fouilles à corps intrusives. De plus, ils perdent en général le bénéfice de leur billet d’avion et sont parfois mis sur une liste noire de la compagnie aérienne qui les empêche de voler sur cette même compagnie pendant six mois. (…) Le Commissaire invite les autorités françaises à mettre un terme à ces pratiques sans délai."

Régularisations de travailleurs sans papiers : une application arbitraire

De nombreux observateurs ainsi que les médias ont indiqué que le nombre de régularisations avaient été prédéterminé par les autorités ministérielles compétentes avant même l’examen individuel des dossiers ; ce nombre étant, dans les deux cas, bien inférieur au nombre d’étrangers susceptible de remplir l’ensemble des conditions requises. Cette prédétermination a engendré une application subjective et inégalitaire voire arbitraire des critères de régularisation. Ces régularisations collectives ont par ailleurs permis de constater que de nombreux étrangers irréguliers étaient pleinement intégrés dans la société française et, bien que sans papier, ils disposaient pour la plupart d’un logement, d’un travail et contribuaient à la croissance du pays par le paiement des impôts. Lors de sa visite au centre de rétention du Mesnil-Amelot, le Commissaire a d’ailleurs pu confirmer cette impression en discutant avec les retenus qui pour beaucoup avaient été interpellés alors qu’ils se rendaient à leur travail.

Gens du voyage et Roms

De nombreux voyageurs sont donc contraints, faute d’alternatives, à vivre en stationnement irrégulier. Ce non respect de la loi Besson contribue à créer des tensions, puisque les Gens du voyage ne sont pas autorisés à s’installer sur les terrains de campings. De plus, les sanctions sont particulièrement sévères en cas de stationnement sur des terrains non autorisés. (…)

On constate que les Gens du voyage, de nationalité française, sont soumis à un droit dérogatoire qui ne s’applique pas aux autres citoyens français. En vertu de la loi du 3 janvier 1969, les personnes de plus de 16 ans qui n’ont pas de domicile fixe doivent être en possession soit d’un carnet de circulation, si elles n’ont pas de ressources régulières, soit d’un livret de circulation, si elles ont une activité professionnelle. Ce carnet de circulation doit être visé par une autorité administrative tous les trois mois. (…)

Le droit de vote est accordé aux Gens du voyage seulement trois ans après leur rattachement administratif à une commune, alors que ce délai est de six mois pour tous les autres citoyens. (…) Le Commissaire estime que ces différentes mesures dérogatoires instaurent un régime discriminatoire à l’encontre des Gens du voyage. La plupart de ces recommandations ayant déjà été formulées par le rapport de 2006, il appelle les autorités françaises à mettre fin, sans délai, à ce traitement spécifique via l’élaboration de politiques adaptées telles que recommandées par le Conseil de l’Europe.

Extraits du Mémorandum faisant suite à la visite des zones d’attentes de l’aéroport de Roissy et du centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot

Les étrangers arrivant en France et n’ayant pas de documents requis pour entrer sur le territoire français font l’objet de placement dans des zones d’attentes en attendant que leur situation personnelle soit examinée par les autorités compétentes. A l’aéroport de Roissy, il s’agit de manière générale de la ZAPI 3, un centre d’hébergement remplissant les conditions nécessaires pour accueillir les étrangers en question. Durant la période citée, qui correspondait de surcroît aux fêtes de fin d’année, un nombre très élevé d’étrangers est arrivé à Roissy en l’espace de plusieurs jours. La grande majorité d’entre eux était des ressortissants somaliens ou russes d’origine tchétchène cherchant à rester en France.

Très rapidement, la ZAPI 3 a atteint son taux d’occupation maximal. Les autorités françaises ont donc décidé de maintenir ces étrangers d’abord dans les différents postes de police de l’aérogare, puis dans la salle d’embarquement B33. Ni les postes de police, ni la salle d’embarquement B33 n’étaient conçues pour héberger d’individus. Ils ne contenaient aucune installation nécessaire pour permettre une vie décente de plusieurs dizaines de personnes pendant plus de quelques heures. Ni les lits, ni la nourriture chaude, ni les douches n’y étaient disponibles. Malheureusement, dans un premier temps, un certain nombre de personnes a été obligé d’y rester durant plusieurs jours, ce qui est inacceptable."

Le Commissaire a pu constater que l’exercice effectif de droits essentiels tels que celui à s’entretenir avec un avocat, à la visite des familles et proches, voire celui de déposer une demande d’asile, était dans la pratique très largement limité.

Les lieux d’attentes utilisés pour retenir les étrangers à la frontière, autres que la ZAPI 3, ne possédaient pas les conditions requises pour un exercice normal de ces droits. Ainsi, aucun local isolé ayant un accès libre pour les avocats et associations n’était disponible. A l’évidence, une réflexion quant au renforcement de la présence d’associations tout au long de la procédure devrait être engagée.



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